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L'ombre de la corne
10 janvier 2008

L'hôtel se réveille au cri des oiseaux colorés

    L'hôtel se réveille au cri des oiseaux colorés qui s'agitent dans les cages en terrasse. Une New-Yorkaise est en pleurs devant la télévision. Des Palestiniens ont détourné des avions de ligne pour les fracasser sur le World Trade Center.

Dans le carré de la Plaza de armas, de grossières cartes du Pérou se baladent à bout de bras, les cireurs de chaussures scrutent les pieds des passants, des sachets d'infusions ou de thés se rendent désirables, quelques couteaux de sacrifice et oiseaux en métal doré poursuivent de rares grappes de touristes gênés.

Pendant qu'Ymersmf feuillette à mes côtés un fanzine peuplé de musiciens catholiques et s’exclame en moult commentaires, la fanfare bleue et rouge du Président entre dans la cour du palais, barrit ses trois petits airs de clique et puis s'en va. La foule agglutinée contre les grilles n'applaudit pas.

    A l'angle d'une rue, un essaim d’hommes et de femmes équipés de calculatrices comptent et recomptent leurs liasses de billets, changent des dollars ou font de la monnaie. Quatre badauds médusés observent la destruction de New-York à travers la vitrine d'un marchand d’électroménager. Le Pentagone et la Maison Blanche sont amochés à leur tour. Dans une ruelle encombrée de meubles, Ymersmf,  qui se fait appeler Brandon, rencontre son père à la sortie de l'église. Nos chemins se séparent là. Toujours aucune trace de cartes détaillées du pays.

    Après la sieste, je décide de partir demain pour Ayacucho, le berceau du triste Sentier Lumineux. Un bon pallier pour m'adapter à l'altitude.

    Carlos est au rendez-vous, je lui refile un paquet de stylos et de cahiers afin qu'il s'occupe des enfants à la rue, qu'il leur apprenne à lire, à compter, à écrire, à ne plus mettre le nez dans les tubes de colle. Il est embarrassé. A cet instant, passe un gosse aux grands yeux de misère. Sa bouche n'est pas encore ouverte qu'il tient feuilles et encres contre son torse incrédule.

    Carlos habite les beaux quartiers. Dans la cuisine, son adorable mère nous prépare du thé, de la viande et des biscuits avec de la confiture d'orange et d'ananas. La télévision retransmet un discours du président américain qui accuse l'Afghanistan. Des sillons de peur griffent le visage de cet imbécile.

A l’heure de m’en aller, la mamá m'offre un sachet de mate de coca pour que je supporte mieux les effets de l'altitude. Carlos m’accompagne jusqu’au boulevard. Nous nous saluons sobrement et je m'éclipse dans un taxi. A la faveur de la nuit, le chauffeur dédaigne les feux tricolores et les panneaux de stop. Il ne devient causant qu'à l’instant de notre arrivée à l'hôtel et me fait le coup du vieux copain. Je ne passerai pas la nuit à parlementer, je le laisse m'arnaquer de deux soles.

        Seul dans le grand dortoir, je me fais boule de poils et de chair comme Zach le chat noir. J'imagine ses ronronnements contre la hanche somnolente de Saafkyu, la jolie fée qui garde ma chaumière.

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