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L'ombre de la corne
6 février 2008

Par-delà l'immense plaine limpide, la tête

Par-delà l'immense plaine limpide, la tête blanche d'une montagne s'illumine au-dessus de Tiwanako. Le froid nocturne a cinglé la peau épaisse des ânes qui braient à tout bout de champ et surprennent le coq dans son sommeil. La toile de ma tente est raide de givre.

Deux bonshommes traversent la voie ferrée en bavardant et viennent me saluer. L'un pousse son vélo, l'autre sourit, les mains dans les poches. Ces deux vieux ont la matinée joviale, ils acceptent avec plaisir les feuilles de coca que je leur propose; après quoi chacun des trois tios emprunte son propre chemin.

Une heure plus tard, mon bâton se pose sur les terres sacrées, près du village qui lance des étincelles de soleil. Des Indiennes vendent un artisanat inspiré par leurs ancêtres disparus à côté de quelques gâteaux, bonbons et autres boissons gazeuses. Il faut payer pour entrer dans l'ancienne Tiwanako. Rien de spectaculaire, il reste peu de choses. Un monde ancien renaît sous les caresses aux pierres. Derrière le grillage, au bout du chemin qui file vers l'est depuis les vestiges d'une haute pyramide, deux hommes et une femme discutent en attendant celui qui achètera leurs bibelots, petits pots de terre ou fossiles marins trouvés dans les collines.

Des dizaines de têtes blanches surgissent des murs en pierre mauve qui tapissent l'intérieur d'un cube de terre arraché au site sacré. Au centre, en silence avec elles, trois monolithes espèrent la réincarnation du Dieu-félin et de ses quarante-huit guerriers à plumes statufiés dans la Porte du Soleil. Partout des blocs taillés habillent leurs secrets d'une simplicité anodine. Un gardien affirme que mon bâton de marche n'est pas en bois d'eucalyptus mais en madera.

  Les lustres ont passé, je cherche au village un bureau de poste qui n'existe pas. Dans le bus vers Puno, l’étrange sensation d’être immobile tout en me déplaçant à vive allure me stupéfie.

  Des croyants ont tendu des banderoles pacifistes sur les portes de l'église. En-dessous, sur les marches, de vieux musiciens aux visages inexpressifs offrent leurs plus belles notes au petit peuple de la place. Je regagne tranquillement un des quatre lits vides de ma chambre tandis que le brouhaha des jeux vidéos et des touristes indécents assoupit la rue Lima. Le patron de l’hôtel organise des excursions vers les îles Taquile et Amantani où je compte passer les nuits prochaines.

         Avant de dormir, je consulte mon petit dictionnaire : Madera c’est le bois !

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